- affûter
-
• 1680; « poster, disposer, mettre en état » XIIe; de à et fût1 ♦ Aiguiser (un outil tranchant) en reconstituant le profil de coupe. Affûter des couteaux, des scies. ⇒ affiler.2 ♦ (1906) Sport Préparer soigneusement (un cheval) afin qu'il soit en pleine forme pour une course.⊗ CONTR. Émousser.Synonymes :- affiler- aiguiser- émoudre- repasser- tailler● affûter verbe transitif (de affût) Mettre un canon sur l'affût.affûterv. tr. Aiguiser (un outil), le rendre tranchant.I.⇒AFFÛTER1, verbe trans.I.— Emploi trans.A.— Vx, auj. rare. Disposer, ajuster :• 1. Béelzébuth, (...) s'était fait ce raisonnement triomphal qu'il serait difficile de lui tirer les oreilles puisqu'il n'en possédait pas, et qu'on ne pourrait se livrer sur lui à cette plaisanterie vulgaire de lui affûter une casserole au derrière, puisque la queue absente interdisait ce genre de facétie...T. GAUTIER, Le Capitaine Fracasse, 1863, p. 31.B.— Spéc. Préparer, disposer un engin, un outil, un animal, etc., de manière qu'il puisse servir.1. ARTILL., vx. ,,Disposer le canon pour tirer.`` (Ac. 1835-1878, Ac. t. 1 1932), (cf. affût1). Synon. de mettre en batterie :• 2. ... les quarteniers (...) firent redresser les fossés et affûter les canons aux murailles, aux portes et aux tours.A. FRANCE, Vie de Jeanne d'Arc, 1908, p. 69.Rem. S'est dit p. ext. de toute autre arme à feu (Lar. 19e, Nouv. Lar. ill.).2. ÉQUIT. ,,Mettre la dernière main à la préparation d'un cheval en vue d'une compétition sportive et, plus spécialement, d'une course.`` (Lar. encyclop., seul à attester cet emploi).3. TECHNOL. ,,Ajuster un outil tranchant au fût en bois qui le maintient dans la position la plus propre à le faire couper.`` (CHABAT t. 1, 1875).Rem. Attesté ds Lar. 19e, LITTRÉ, Nouv. Lar. ill., Lar. encyclop.4. Argota) ,,Affûter ses crochets, ses crocs, ses meules, ses tabourets.`` (BRUANT 1901, s.v. manger) ,,Manger.`` (BRUANT 1901, s.v. manger). Pierre à affûter. Synon. de pain (cf. A. DELVAU, Dict. de la langue verte, 1867, p. 370). Affûter ses pincettes. ,,Se disposer à courir, à s'enfuir.`` (Lar. 20e).Rem. Il a existé une var. pronom. de cette loc. :Ch. VIRMAÎTRE, Dict. d'argot fin-de-siècle, 1894, p. 6.b) Affûter qqn. Embaucher, engager un complice mercenaire (cf. L. RIGAUD, Dict. du jargon parisien, L'Argot ancien et moderne, 1878, p. 6; cf. également A. SIMONIN, Le Petit Simonin illustré, dict. d'usage, 1957, p. 21).Rem. Se rattache sans doute au dial. affûter « habiller » (cf. FEW t. 3, s.v. fustis); de là « équiper (au moment de l'embauche) » (cf. affûtage1, affûté).II.— Emploi pronom.A.— Emploi réfl., arg. S'affûter. ,,S'habiller.`` (L. RIGAUD, Dict. de l'argot moderne, 1881, p. 6).S'affûter (...) suivi d'un des mots (...) signifiant bouche, estomac, gorge, gosier. (BRUANT 1901, s.v. boire) ,,Boire.`` (BRUANT 1901, s.v. boire).B.— Emploi passif. 1. Vx. Être disposé, ajusté. 2. ARTILL. ,,Être mis sur l'affût, en parlant d'un canon.`` (BESCH. 1845, qui est seul à l'attester).II.⇒AFFÛTER2, verbe trans.CHASSEI.— Emploi trans., vx.A.— ,,Poster derrière un arbre.`` (DG).Rem. Attesté également ds ROB., avec la mention ,,anciennement``.B.— P. ext. Chasser à l'affût :• 1. Mais il m'arrive souvent d'affûter les ramiers, en lisière de notre bois, sous les grands chênes qui bordent la route. Alors je ne rentre guère qu'à dix heures.G. BERNANOS, Monsieur Ouine, 1943, p. 1371.C.— Arg. Tromper quelqu'un.Rem. 1. Attesté ds Lar. 19e, Nouv. Lar. ill. Il faut sans doute supposer une expr. comme affûter (une bête). 2. Nouv. Lar. ill. signale un affûter « rendre rusé » (cf. affût2 C 2, être d'affût). Cet emploi, mal établi, s'expliquerait mieux si on le rattachait à futé « malin ».II.— Emploi abs., vx. Se tenir à l'affût, chasser à l'affût :• 2. Affûter, v. n. Être à l'affût, se poster pour attendre le gibier. Terme connu dans le Berry et sans doute ailleurs. Dans le vieux français on disait : S'affûter.J. HUMBERT, Nouveau glossaire genevois, 1852, p. 9.Rem. Attesté seulement ds LITTRÉ et Nouv. Lar. ill.III.— Emploi pronom., vieilli. Se mettre à l'affût.Rem. Attesté ds Ac. Compl. 1842, BESCH. 1845, Lar. 19e, Nouv. Lar. ill.— Au fig. Épier l'occasion de faire quelque chose.Rem. Attesté ds Ac. Compl. 1842, BESCH. 1845, Lar. 19e, Nouv. Lar. ill.III.⇒AFFÛTER3, verbe trans.I.— Emploi trans.A.— Aiguiser un outil, en particulier sur une pierre posée à plat, en aviver le tranchant (cf. affût3) :• 1. Le collier de Top était fait d'une mince lame d'acier trempé. Il suffisait donc de l'affûter d'abord sur une pierre de grès, de manière à mettre au vif l'angle du tranchant, puis d'enlever le morfil sur un grès plus fin. Or, ce genre de roche arénacée se rencontrait abondamment sur la grève...J. VERNE, L'Île mystérieuse, 1874, p. 115.• 2. Soigneusement, les deux vieillards affûtèrent leur couteau à un caillou plat, sur lequel ils avaient craché au préalable...R. MARAN, Batouala, 1921, p. 88.• 3. C'est l'affaire du « résinier », qui opère dès que le marteleur a terminé. Une ceinture de cuir garnie de trois pierres pour affûter autour des reins, à la main « le hapchott », hachette courbe et concave en son milieu, dont le tranchant coupe comme un rasoir, une gourde en peau de citrouille en bandoulière, il part, à l'aube.J. DE PESQUIDOUX, Chez nous, t. 1, 1921, p. 119.Rem. BESCH. 1845 : ,,donner le premier tranchant à un outil neuf``.— Au fig.• 4. Lui qui, d'ordinaire, écrit avec une facilité parfaite, il revient sur toutes les phrases, il les aiguise, il les affûte.G. DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Les Maîtres, 1937, p. 131.Rem. On a aussi rattaché à un emploi fig. de affûter3, le part.-adj. affûté « rusé » (cf. affûter2 I C rem. 2 et affûté).B.— P. ext. Rendre pointu (une plume, un crayon, tout autre objet) :• 5. Claude (...) affûtait ses moustaches dans la glace...R. FALLET, Banlieue sud-est, 1947, p. 27.• 6. Avec un canif d'ivoire incrusté d'abeilles d'argent, d'un travail assez riche, Elzelina affûta soigneusement la plume de cygne noir...A. ARNOUX, Roi d'un jour, 1956, p. 28.II.— Emploi pronom.A.— [En parlant d'outils, de crayons, en gén. de tout ce qui doit être pointu pour servir] Être aiguisé.Rem. Attesté ds BESCH. 1845, Lar. 19e et Nouv. Lar. ill.— Par métaph. :• 7. Elles [deux hirondelles] venaient à l'école au fond de ma poche, et retournaient à la maison par les airs. Quand la faux luisante de leurs ailes grandit et s'affûta, elles disparurent à toute heure dans le haut du ciel printanier...COLETTE, La Maison de Claudine, 1922, pp. 83-84.B.— [En parlant d'un oiseau] S'affûter le bec :• 8. Il songeait à ces volières dans lesquelles on suspend parfois une petite glace scintillante, à côté de l'os de seiche sur lequel les oiseaux diaprés viennent s'affûter le bec.G. DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Suzanne et les jeunes hommes, 1941, p. 281.Prononc. ET ORTH. — 1. Forme phon. :[afyte], j'affûte [
]. Enq. :/afyt/. Conjug. parler. 2. Dér. et composés : affût, affûtage, affûté, affûteur, affûteuse, affûtiau, affûtoir, rafut, raffûter. Cf. fût. — Rem. FÉR. Crit. t. 1 1787 emploie comme vedette la forme affuter sans accent circonflexe et précise à ce suj. : ,,L'Acad. écrit avec un acc.-circ. sur l'u. Pourquoi cet accent? L'u est bref.`` FÉR. Crit. t. 1 1787 propose également la graph. afuter avec un seul f. Au XIXe s., le mot est enregistré sans accent ds PRIVAT-FOC. 1870.
Étymol. ET HIST. — Apr. 1170 pronom. s'afuster « s'appuyer, se mettre en position » (WACE, Rou, 3e p., 10083, Andresen ds GDF. : Quant li reis e li chevalier E cil qui esteient archier S'afusterent, lor ars tendirent); d'où 1354-1376 vén. afuster « mettre à l'affût » (Modus et Racio, ms. f° 64 r° ds LA CURNE t. 1 1875 : Si les met [les lévriers] ès futayes au lonc de tes rais, et les afuste en telle manière qu'ilz puissent veoir l'un l'autre), qualifié de vieilli par DG; 1411 artill. « ajuster un canon » (Chron. Bourguignonne, La Fons, La Thierache, 2e liv., p. 9 ds GAY t. 1 1887, s.v. bombarde [...] Mais le bombarde estoit sy hault afustée qu'elle passa tout par derrière la ville), qualifié de vx par Ac. 1835; 1680 technol. (RICH. : Afuter [...] Eguiser. Afuter les outils).Dér. de fût « pièce de bois »; préf. a-1, dés. -er.STAT. — Fréq. abs. litt. :37.BBG. — BAILLY (R.) 1969 [1946]. — BAR 1960. — BÉL. 1957. — BÉNAC 1956. — Canada 1930. — CAPUT 1969. — CHABAT t. 1 1875. — DAUZAT Ling. fr. 1946, p. 5. — DUP. 1961. — ESN. 1965. — FROMH.-KING 1968. — JAL 1848. — JOSSIER 1881. — LARCH. 1880. — LA RUE 1954. — MAT. Louis-Philippe 1951, p. 282. — MICHEL 1856. — PRIVAT-FOC. 1870. — RÉAU-ROND. 1951. — SPITZER (L.). Anglo-French etymologies. Mod. Lang. Notes. 1944, t. 59, pp. 223-235.affûter [afyte] v. tr.❖———I Vx.1 Poster derrière un arbre. — (XIVe). Par ext. (vieilli). Chasser à l'affût. || Affûter des canards.1 (…) il m'arrive souvent d'affûter les ramiers, en lisière de notre bois, sous les grands chênes qui bordent la route.Bernanos, M. Ouine, in Œ. roman., Pl., p. 1371.♦ Pron. || S'affûter : se tenir, chasser à l'affût. ⇒ Affût.2 (1411). Disposer, mettre en batterie. || Affûter un canon.———II1 Vx. Disposer, ajuster (un outil). Spécialt. Ajuster un outil à son fût.2 (1906, in Petiot). Sports. Préparer soigneusement (un cheval) afin qu'il soit en pleine forme pour une course.———III (1680). Cour. Aiguiser (un outil tranchant) en reconstituant le profil de coupe. ⇒ Affiler, aiguiser, émoudre, repasser. || Affûter une lame, des couteaux, des scies. || Une meule à affûter.♦ Par ext. || Affûter un crayon, en refaire la pointe. ⇒ Appointer, tailler.♦ Fig. || Affûter ses phrases, des arguments. ⇒ Aiguiser.——————s'affûter v. pron.♦ Fig. Devenir plus perçant, en parlant du regard.2 Alexandre Kozlov fronça les sourcils et son regard s'affûta.H. Troyat, les Eygletière, p. 140.——————affûté, ée p. p. adj.1 (Au sens I.). Vx. || Un canon bien affûté.2 (Au sens II.). Vx. || Affûté de… : muni de…3 (Au sens III.). Mod. || Couteau affûté. ⇒ Aiguisé, tranchant.♦ Fig. Fin, aigu (esprit); rusé. || « Un caractère (…) pénétrant, inquisiteur et affûté à un point inimaginable » (B. Cendrars, Bourlinguer).❖CONTR. Émousser.DÉR. Affût, affûtage, affûteur, affûtiaux, affûtoir.
Encyclopédie Universelle. 2012.